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dimanche 3 mai 2009

photo eipho


Gavriil Kirsan est né à 73 ans. Si ses premières années à la maison de repos « Rosa Tsvetana » furent emplies d'une paix intérieure qui propageait bien-être et sérénité à ses proches, le reste de sa vie fut marqué par une longue et laborieuse entreprise.
À 72 ans, Gavriil eut sa première dent, un an après il commença à radoter et six mois plus tard, il jeta sa canne dans le vide ordure de la cantine et serra la main du directeur, pour se lancer déclara t-il, à la conquête du monde.
À peine sut-il courir, que Gavriil Kirsan explora l'Inde à dos d'éléphant, dans une aventure qui alla le conduire au bout de trois longues années jusqu'à l'Aeropuerto Internacional de Madrid, non loin d'un grand cimetière d'où celle qui devint sa femme naquit deux semaines plus tard.
C'est à 66 ans que Gavriil épousa Susana. Ils aménagèrent à Valence où tous deux passèrent leur temps dans les livres et leurs occupations au jardinage et à la peinture. Gavriil s'essaya à la poésie, Susana à la spiritualité dans le yoga.
Et puis un beau jour, vint la fin de l'adolescence. Gavriil et Susana découvrirent leurs deux fils de 29 et 31 ans, vivants en Amérique latine où ils allèrent s'installer précipitamment.
Alors à 53 ans, Gavriil travailla dans une mine à charbon onze heures par jour pendant huit ans, ensuite il devint chauffeur-routier pour une carrière voisine, et c'est à l'âge de 41 ans qu'il fit connaissance avec Mama Liz, sa mère, qui vint au monde.
Enfin à 13 ans, Gavriil perçut sa retraite. Une somme misérable dont il se suffit néanmoins. Sa femme se fit vieille et la perte de toutes ses rides annonça le pire.
Leurs dernières années furent séparées par des parents trop jeunes pour demeurer, de part leur activité, à un endroit précis. Ils se dirent au revoir un triste matin d'octobre, Gavriil alors âgé de 12 ans sombra dans un autisme profond quand Susana déménagea, et le reste de sa vie glissa lentement dans une fuite de mémoire, une disparition du langage, une régression tragique.
Mais Gavriil Kirsan fut ce vieillard heureux, ayant toujours ce sourire apaisant dans toutes les situations, jusqu'à l'heure de son enterrement dans le ventre de sa mère, d'où il rejoignit le paradis.


5 Comments:

  1. zamomi a écrit...
    Ce texte est merveilleux...
    Jub a écrit...
    Excellent!
    Juste Excellent l'ami!
    MUTTI a écrit...
    Au-delà, au-delà de l'excellence... tout simplement sublime ce sens de l'éternité de l'éternel recommencement sans haut ni bas, sans âge réel,juste un mouvement de l'esprit dans l'espace, un mouvement immobile sans réel dehors ni dedans... une sensation simple, d'existence...
    lucette virelle a écrit...
    Ce texte merveileux m'a profondément perturbée, l'éternel recommencement...
    ☼ France ☼ a écrit...
    Merci pour ce texte extra. Pour la photo j'en ai une aussi mais pas encore sur mon blog. J'adore

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