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Espace dimensionnel - Space Fictions + Photos
Design, textes et photos eipho

mercredi 29 août 2007


Une pomme elle sera, on l'attend.
Dans sa boite à gants, un parasol, trois mouchoirs, six cassettes, un caniche replié, quatre bombes de peinture, deux robes et un accessoire bateau-atelier.
Les chenilles de son véhicule avancent à vive allure sur l'autoroute une voie à fil de soie.
De part et d'autre, les deux bouts de cette route sont retenus par deux mains taillées dans la roche, un pouce et un index font office de pinces et retiennent dans le vide, là fragile trajectoire à balance.
Plusieurs mètres de cheveux s'enfouissent en arrière en une longue traînée bleue et attirent autour d'eux, les xligadores (oiseaux gigantesques suivant les chars à voiles tout le long de leurs trajets).
Au bout d'un mouvement rouge de l'astre brun elle arrive enfin et fait écouter une cassette pour passer le contrôle des Plantes, tenant ici, toute la partie sud du monde.
Il y a dans cette cassette, un échantillon de sa voix, un fragment de terre natale ainsi qu'une réplique exacte, des racines paternelles.
Tout se passe pour le mieux, direction le labyrinthe du Grand Lebowski.
L'abbé est là, entouré d'une forêt d'acacias, les villageois s'étant encore transformés pour la journée.
" Voici ma plus grande oeuvre, elle arrive. Admirez comme une graine peut parcourir avec le vent, guidée par sa nature !, une pomme elle sera, une pomme sans pommier ! "


vendredi 17 août 2007



Dans ma gamelle, mon écuelle en bois
j'ai trouvé un verre pain d'épices, mais aussi
ses doux mots allongés sur haricot
le cri perçant d'un papillon
et la douceur d'un matin blanc.

Dans ma gamelle, j'ai trouvé
une gamme d'elle, ma belle et tortueuse amie
une chandelle pour sa demeure, j'y amène
un cerf-volant fait de papier de mes lettres
pour monter plus haut et tomber chez elle
dans une rue qui sent bon les fraîcheurs d'antan.

Pour elle, j'emploie ma plus belle voyelle
la console de ses peurs torrentielles
lui dit "eh mam'zelle, vous êtes belle"
j'aime sa rue de bonbons, sa jolie rue si douce
j'aime quand elle épelle mon nom
toute la journée les oreilles au vent, je l'attends.

Dans ma gamelle, toute une citadelle
des fleurs citronnelles, son parfum demoiselle
envoûtant, enivrant, une entière gamme d'elle.
Elle habite là-bas, un endroit soleil qui m'ensorcelle
sur sa robe, une coccinelle à dentelle et trois mirabelles
un beau souvenir et tout son être, intemporel.

Pour elle, je ferme les yeux et fais le beau
pour elle je roule sur l'herbe dimensionnelle
elle me voit et me sourit sous son ombrelle
alors je fais attention, à sa gamme d'elle
pour moi c'est passionnel, elle habite là-bas
dans une rue sensationnelle.

Dans ma gamelle, quelques vermicelles couleur violoncelle
toute la journée, j'ai ses odeurs de sa gamme d'elle
c'est officiel, de mon statut canin, je l'aime
comme une belle aquarelle, avec toutes ses gammes, à elle.
Voyez-vous j'aime plus que tout sa rue, sa jolie tourelle
ses sentiers mimosas, la rivière et la passerelle.
Elle habite là-bas, avec sa gamme d'elle
et moi dans ma gamelle, je ne pense qu'à ses ailes.

Alors j'aimerais lui dire, lui chanter des airs pour qu'elle
la fille à la cannelle, vienne aussi un peu me voir
sous la pluie qui ruisselle, ma petite niche et mon totem
près du peuplier, au milieu d'un champ qui me rappelle
comme je préfère aller chez elle.
Mes frissons sont fraternels, mes murmures optionnels
et ma grande faiblesse, c'est sa gamme d'elle
quand je la vois courir, quand je la vois me parler
me regarder, quand je la vois aimer et puis sentir
quand je la vois pleurer ou s'amuser, quand je la vois........
sa rue tourterelle, sa belle rue dans ma gamelle.


mardi 7 août 2007





Le colonel Floyd était venu nous voir
accompagné de son fidèle, le bien pensant caporal Clegg
nous clochards terrestres, errants du rien, célestes.
Un vieux matin d'étoiles avait surgi derrière une caisse à refrains
et s'était posé là, écoutant les sages paroles de l'officier.
_ Mes amis, jour grand pour vous, n'est-il pas vous le serez,
regardez plus atteints vous n'êtes, plus rien, c'est mes amis fini !

Le colonel s'était détaché d'une affiche gribouillée
plantée là sur un mur, depuis bien deux longues années.
Il avait eu le temps de nous voir le bougre
en pleine hallucination paranoïaque sur fond urbain.
Et par cette grande nuit qui ressemblait à une tempête d'étoiles
il en était sorti.

Pour nous il n'était rien d'autre qu'un pestiféré
un partisan de la guerre et de ses marches funèbres.
Mais bien des fois, nous trinquions à sa santé, car il gisait ici,
chez nous, dans un coin de rue sombre et éloignée.
A son arrivée, aucune bouteille n'a valsé sur sa poire,
nous nous sommes tous regardés,
nos clopes en sont tombées de nos lèvres
et nous n'avons pu le quitter des yeux,
lui et son caporal, qui au passage n'était plus sur l'affiche.

_ Allons n'ayez craintes, est venu le moment,
ici présent mon bon caporal, vient tout juste du haut conseil m'apporter l'autorisation, vous n'êtes plus ce que vous croyez être, et inutile de voulez-vous, remercier.
_ M'enfin de quoi parles-tu colonel, demanda Harry, le premier à se lever.
_ Et que nous veux-tu, continua Pierrot sa bouteille à la main.
(Il faut dire qu'Ici, nous avons tous pris l'habitude de le tutoyer sur son affiche, alors les vieilles coutumes sont dures à perdre..)

Tous les ivrognes du coin se sont joints à nous,
au bout de trois fois moins qu'un quart d'heure
nous étions une dizaine derrière le feu
reflétant nos ombres sur le mur et l'affiche
et le colonel nous répéta encore:
_ Vous ne serez jamais plus ce que vous pensiez être !
puis il disparut ou plutôt réapparut dans son affiche avec le caporal,
tous deux immobiles comme par le passé, comme si rien ne s'était passé.

C'est alors que pour la dernière fois, nous avons entendu la voix du colonel
comme transportée dans la nuit, au dessus de nos têtes,
nous en avons vu que la voie lactée et elle a résonné en nous pour toujours:
_ Frères d'armes, vous êtes tous, des frères d'armes.
Et c'est ainsi que jours après mois, minutes après heures
le contenu de chaque bouteille que nous absorbions était devenu de l'éjoispar
comme nous l'avons désormais appelé.
Ce n'était plus de l'alcool non, plus de poison pour nos vieux jours
mais un élixir de joie et d'espoir qui a fait de nous, pauvres rats,
des gens à part, métamorphosés, qui désormais, aimions vivre.
Certains sont allés retrouver leurs enfants, d'autres partis embrasser leur épouse, redonner signe à leur famille, retrouver du boulot et de nouveau, aimer la vie. Le sentiment de dégoût, la morosité, tout ça avait été effacé.

Ainsi dans un autre quartier, entre poubelles et détritus
au milieu de sans-abri, de pauvres gens du désespoir
l'affiche du colonel régnait à moitié déchirée
et était prête à présent, pour un énième signal du caporal Clegg.


jeudi 2 août 2007


" On va tous se métamorphoser en chef-d'oeuvre,
hors-d'oeuvre pour certains, main-d'oeuvre pour d'autres"
_ Répétez " Je suis une oeuvre " bleue, rouge ou marron,
attention pas de blanc, le blanc est synonyme d'échec.
_ Répétez " je suis une oeuvre " et faites l'oie sauvage.

_ Je vois que monsieur le Maire a beaucoup d'entraînement,
" regardez vous tous et prenez exemple sur le chef du village,
regardez il est déjà en train de se transformer en chef-d'oeuvre ! "

_ Vraiment vous arborez là un très beau duvet monsieur le Maire.
_ Ouais l'abbé et mon bec n'est-il pas beau ?
_ Oh si, d'ici peu vous serez prêt à vous envoler.
Mais pour cela il faut continuer à engraisser vous le savez, n'est-ce pas mon bon ami ?
_ Oh oui l'abbé vos paroles sont divines, regardez les gens,
ils ont l'air tellement heureux, regardez les se lustrer les plumes !

Le jeu de l'oie est un phénomène dans la région et par les quatre ronds du pays, les gens accourent pour se métamorphoser également en oeuvre.

_ Hier ils étaient des peintures et s'aplatissaient contre les murs,
quel spectacle, un musée humain !
_ Vraiment l'abbé ! vous faites fort et vous, en quoi êtes-vous transformé ?
_ Moi je suis une oeuvre d'apothicaire, ça ne se voit pas ?
_ Ah ?
_ Oui je peux remplir n'importe quel tiroir juste par mon bon vouloir, exemple;
vous conduisez une orange et vous avez la nette impression d'éternuer dans la clémentine d'à côté, et bien moi je dévisse une pompe à vélo sur un pédalo d'aviation !
_ Ah !
_ Et oui, très pratique, aussi, si un jour vous avez besoin d'un nouveau triple de genoux et bien moi, je confectionne des idées à pulsions rétractables à partir de jambon gris, qui servent à se nettoyer automatiquement dans une caisse à mouche, et oui !
_ Eh bien dites moi, vous êtes sacrément astucieux, une chance pour nos fidèles, mais... où sont-ils donc tous passés ?
_ Oh vos villageois à l'heure qu'il est, ont dû s'envoler dans le sol.
_ Par ma barbe l'abbé ! je vous fais mienne,
une cruche à l'eau qui roule, vaut mieux que trois tu l'auras !
_ J'accepte.