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Espace dimensionnel - Space Fictions + Photos
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lundi 24 mars 2008

Rencontre avec Chun Mee


_Avez-vous 42 schillings ?
_Non je n'ai pas 42 schillings
où puis-je trouver 42 schillings cela ne se fait plus.
_Il existe, des collectionneurs et je peux, vous en recommander un.
avez-vous 42 schillings ?
_Non je n'ai pas 42 schillings
où puis-je trouver ce collectionneur ?
_Vous l'avez devant vous
avez-vous 42 schillings ?
_Non je n'ai pas 42 schillings
comment obtenir ces 42 schillings ?
_Quelle valeur a cela pour vous
quel prix désirez-vous y mettre, qu'avez-vous à offrir ?
_Je pense que j'ai ça pour vous maintenant en effet
ne bougez surtout pas, je reviens.

_Vous voulez de ce thé spécial
avez-vous cette somme maintenant ?
_Oui j'ai 42 schillings
ceci vaut 42 schillings.
Voici une tasse et pas n'importe quelle tasse
or elle ne marche qu'avec cette sorte de thé
faisons échange, ceci vaut bien 42 schillings.
_Je suis d'accord, vous avez les 42 schillings
donc vous avez ce thé à présent, mais attention
il s'agit là d'une variété extrêmement forte.
_Ne vous en faites pas
je possède encore quelques unes de ces tasses.
_Ce n'est pas pour les tasses que je m'inquiète
oh, une dernière chose avant de nous quitter
quand vous verrez la lumière bleue, agrippez-vous.


A suivre ici: rêves de thé 5

dimanche 23 mars 2008

Trois sachets dans une tasse, d’un seul coup, l’homme avale son thé, corsé, et s’évanouit.
Une main se pose sur son front et disparaît. Une femme l’appelle et disparaît.
Au loin il y a le nom d’une gare, un long couloir, le service des consignes et il se souvient.
Elle, lui remettant une clef avant son départ, le regardant à nouveau et s’en aller. Une simple clef rouge sur laquelle était gravée, une aile en forme de S.
L’homme prend la route, éveillé ou endormi, qu’importe, il prend la route.
Il y a sur sa figure la volonté d’aller jusqu’au bout, il y a aussi cette drôle de sensation que l’on ressent encore et l’on s’imagine en le voyant, que cet homme n’a plus rien à perdre.

Les kilomètres défilent comme le long tracé d’une existence, les rayures blanches ne sont plus que les frontières d’une vie tourmentée. Effet hypnotique sur un temps en distance, ses yeux ne clignent plus et le voilà qui arrive bientôt, dans une petite rue où il a vécu, avant que tout cela ne commence.
Une petite rue où ses jours d’autrefois, ne semblaient pas si mal après tout. Un gentil boulot, une merveilleuse femme, un toit pour vivre et un enfant qui faisait leur joie à tous les deux.
Et puis il y a eu ces rêves, pire qu’une drogue. Des rêves dans lesquels, il essayait sans cesse de retourner. Des rêves de thé, alternant réalité et divagations psychédéliques. Du coup il ne sait plus vraiment, s’il y a bien eu un accident, s’il est vraiment tombé dans le coma ou s’il n’est pas simplement devenu fou. Mais ce qu’il sait plus que tout, c’est qu’il a aimé et qu’il aime toujours et cela l’atteint encore, maintenant.
L’homme se lève, le voilà dans une chambre d’hôtel et l’homme comprend.
Une tasse de thé vide trône sur une petite commode juste à côté du lit et ainsi, après s’être souvenu, il repart en direction de son ancienne habitation, retrouver cette clef, cachée dans le jardin.

De l’autre côté, une femme tente de le joindre.
De cet autre côté, une femme lui envoie un nouveau message et commence à s’inquiéter, aucune réponse, l’ordinateur est éteint. Alors cette femme part de chez elle, prend le métro et attend devant une station de taxi. La voiture de l’homme n’y est pas, encore moins le lendemain, ni le jour suivant. Et nous retrouvons à cet instant cette femme, installée au comptoir d’un bistrot, en train de fumer une cigarette en attendant son verre, avec du noir, qui coule sur ses joues.

L’homme, n’ayant pas envie de voir les nouveaux propriétaires, attend jusqu’à la nuit et récupère avec une chance inouïe, la clef qu’il avait lui-même enterrée puis il file dans l’autre sens, à toute allure sur une autoroute sombre d’impatience mais aussi d’espoirs.
Il se demande jusqu’où cette histoire va désormais le mener, mais il souhaite absolument connaître la vérité par n’importe quel moyen et faire revenir à lui, des instants qu’il pense avoir oublié.
Le jour se lève quand il arrive enfin, devant un casier portant le numéro 63 dans une gare encore endormie. La clef se glisse parfaitement dans la serrure et la porte s’ouvre doucement. A l’intérieur il y a un simple bout de papier. Sur ce bout de papier il y a un message dont l’inscription mentionne : « emmoh lieiv ed licruos »
Voilà tout ce que sa femme ou plutôt son ex-femme lui a laissé. L’homme pense savoir de quoi il retourne et tout d’un coup, cela lui revient très nettement à la mémoire. La femme fait référence à un marchand ambulant que l’on croise de temps à autre à la sortie du métro. Cet homme se nomme Chun Mee et distribue des boissons chaudes pour deux fois rien. Voici donc la prochaine étape.

samedi 22 mars 2008

La voiture démarre, ce n’est pas une course, l’homme conduit simplement cette femme à l’adresse voulue.
Cette femme est une connaissance faite sur Internet, une connaissance qui n’a pas était sans risque pour l’homme.
Cette femme ne parle pas, jamais, il le sait, mais cette femme sait écrire et elle le fait très bien. D’ailleurs elle ne lui a plus écrit pendant des mois et voilà qu’un beau jour, elle refait surface sous couvert d'anonymat et entre de nouveau dans son univers.
Celui-ci devine petit à petit qui se cache derrière ce pseudonyme et la femme est vite démasquée, c’est vraisemblablement ce qu’elle espérait.
Des souvenirs reviennent alors dans la mémoire de l’homme, des agréables comme des moins bons, mais nous voilà arrivés au 42 boulevard Marx Flower et la femme écrivait déjà sur un bout de papier : Monte avec moi.

Après quelques instants, les voilà qui grimpent les trois étages d’un immeuble assez récent. Il y a bien un ascenseur, mais l’un comme l’autre préfèrent faire le peu d’effort physique qui les sépare de l’appartement.
L’homme suit la femme et il se retrouve malgré lui avec son postérieur devant le nez. Cela le gène et il se demande si la femme le fait exprès ou si cela appartient simplement à la situation dans laquelle, il monte les escaliers juste derrière elle.
Nous sommes devant le palier et la femme se retourne, fait tomber le grand manteau à ses pieds, saute sur l’homme en glissant ses jambes autour de sa taille et ils font l’amour, là, ici, maintenant, dans la cage d’escalier.

Pendant ce temps, l’homme pense qu’il est du thé, que cette femme lui fait l’amour mais qu’elle n’aura pas le sien. Alors il se voit tourner dans les rues de la ville en attendant que ça se finisse.
L’homme récupère son manteau, rentre chez lui et éteint son ordinateur pendant plusieurs semaines. Il pense à cette femme et se dit que c’est dommage, tout est dommage.
Cette femme est belle, intéressante mais il y a une chose qu’il n’a pas apprécié et qui ne passera plus, c’est l’hypocrisie. Faire semblant d’être quelqu’un d’autre, jouer un rôle, montrer de faux sentiments aux gens et puis du jour ou lendemain plus rien, plus aucune nouvelle, les laisser tomber.
L’homme lui ne joue pas avec ce genre de sentiments, alors des sentiments pour elle, lui n’en a plus. Il souhaitait juste voir en vrai, de près, qui elle était vraiment.
Et maintenant, c’est elle qui essayerait de le contacter et ne comprendrait pas. Peut-être que comme lui, elle s’en prendrait à elle-même, se disant qu’elle n’était pas assez bien.

L’homme rêve de thé vert, revoit son ex-femme et des tasses se cogner contre sa tête.
_ C’est de la menthe qu’il me faut, suggère t-il.
Il se dirige alors vers le couloir, ouvre une porte et se saisit d’un carton abandonné là.
A l’intérieur, ses vielles notes, des taches de thé renversées sur ses écrits et puis une page particulière qu’il recherche en faisant défiler toutes les feuilles entre ses doigts.
Ici, « emia’t ej » écrit en lettres capitales. C’est bien le code qu’il cherchait, E étant le cinq, ces chiffres additionnés donnent le numéro d’un casier dont la clef est quelque part, toujours bien enfouie dans un tiroir de ses souvenirs.
Et quelqu'un, ailleurs, tape un message.

vendredi 21 mars 2008

Cette nouvelle est une suite de "42 schillings" La tasse de thé planante -

L’homme retrouve un vieux pèse-personne au fond d’un placard et se demande après tant d’années, combien pouvait-il valoir. Il y monte mais ne voit rien. De là, l’écran de son ordinateur sort d’une veille prolongée, une fenêtre clignote, il vient de recevoir un courrier électronique.
C’est une femme qui lui écrit, une femme se transformant en homme vous tournant le dos. Une femme aux comportements d’homme quand elle vous tourne les talons. Il l’a connaît bien, virtuellement, mais suffisamment pour vous en parler.
D’ailleurs à cet instant par le hublot, il reconnaît aussi un manteau rouge. Le manteau seulement, parce que l’homme qui est en dessous, il ne le connaît pas.
Ce manteau rouge était un vieil ami. Etait, car l’homme dont on commence à raconter l’histoire ici, n’a plus voulu qu’il le soit.
Cet homme vous l’avez peut-être connu. A sa sortie de coma, il racontait à qui voulait l'entendre, des rêves étranges de tasse de thé planante, des programmes interférant avec la réalité et d’une femme morte dans un accident de voiture, sa femme.

Depuis cet homme est seul. Sa femme est partie avec leur fille, loin de là.
Alors, depuis l’homme prend des médicaments et recommence à faire des rêves inexplicables.
Des rêves de thé vert.
Mais pour l’heure, il lit le message d’une femme qui est à pied et qui le contact depuis une gare de métro. Elle est à pied parce qu’elle se sent inutile dans la rapidité. Mais il pleut, alors elle lui demande son aide.

" La 404 est fermée depuis ce matin, des pluies diluviennes se sont abattues toute la nuit sur la région, et les météorologues ne prévoient pas d’améliorations jusqu’à samedi. Faites attention également si vous devez rejoindre la nationale 7, il a eu un carambolage impliquant deux poids-lourd à hauteur du vieux tunnel, cependant une voie supplémentaire a été ouverte mais cela implique une circulation alternée et donc de grosses probabilités de bouchons toute la matinée. La 312 reste le meilleur itinéraire à emprunter si vous désirez sortir de la ville. Nous vous conseillons de bien vérifier vos essuies glaces, feux de brouillard avant et de croisement, avant de prendre la route. Vous êtes branché sur G-radio blues, la radio d’information et… "

L’homme coupe la radio et arrête son taxi devant la bouche d’incendie.
Un peu plus loin, une femme sort en courant d’un magasin et saute à l’arrière du véhicule.
La femme a des moustaches de chat dessinées sur les joues et un nez humide, ses habits sont trempés et elle grelotte de froid.
_ Je m’excuse, je n’ai pas le chauffage, dit l’homme au travers son rétroviseur.
La femme ne répond pas.
_ Où allons-nous ?
La femme ne répond pas.
Le taxi démarre et vient se garer une rue plus loin à l’abri des regards.
La pluie cogne sur le capot, dégringole le long des vitres et l’homme retire son manteau.
_ Tenez mettez ça, vous allez prendre froid.
Après un court instant, la femme finit par se déshabiller et c'est en sous-vêtements qu'elle se faufile dans le grand manteau. Elle saisit ensuite un calepin de son sac et écrit : 42 boulevard Marx Flower.

jeudi 13 mars 2008


On se réunissait comme tous les vendredis, à précisément trois heures du matin, au sous-sol d’un café théâtre, par l’intermédiaire d’un water-closet qui nous servait de téléporteur, avec dans les poches, nos sacs de lettres achetées au marché noir. On s’installait sur une grande table et on dépliait un scrabble d’un mètre cinquante sur deux.
De là et quand tout le monde était prêt, le jeu pouvait commencer, accompagné d’un cocktail de lait frais ou d’un jus épicé du siècle passé.
Le premier fabriqua un mot de sept feuilles en deux minutes vingt cinq, dans sa fumée on pouvait lire : « hallucinogène ». Parfait, mot compte double, 38 points.
Monsieur Fabrigoule quant à lui, préféra tirer dans une longue pipe, et ses lettres apparurent dans des ronds de fumée successifs, e, u, p, h, o, r, i, e, qu’il plaça sur le u du mot précédent, lettre compte double, 15 points pour monsieur Fabrigoule qui se frotte les mains.
Et ainsi de suite, la partie pouvait durer des heures tant que tous les joueurs n’avaient pas écoulé leurs dernières lettres.

Mais revenons sur ce monsieur Fabrigoule voulez-vous. Celui-ci pratique la médecine par les plantes et il connaît assez bien cette chère madame Lambronnn, puisqu’ils sont pratiquement voisins. Cette dernière lui a parlé de son frère souffrant, qu’il pense probablement tirer d’affaire, mais ceci à une seule condition, qu’il se joigne à eux pour leurs parties de scrabble végétal, puisqu’un de leurs joueurs ayant trouvé le mot magique la semaine dernière, a atteint le nirvana, le point de non-retour, la pureté parfaite dans l’accomplissement de sa dernière vie.
Ainsi guéri, Sabin Lambronnn ne serait pas obligé de céder son affaire et sa sœur Théoduline pourrait continuer sa vie normalement sans s’inquiéter.
Tout le monde y trouva son compte et on ramena quelques champignons, histoire de finir la partie en beauté sous le brouillard des mots et la vapeur des lettres.



mardi 11 mars 2008


Sam Révolve Air est, chasseur d’arc-en-terre.
Il vit dans le royaume où,
six reines raisonnent, six rousses à la peau noire.
Un jour il trouve, une fouine mauve écrasée sur un sentier,
par le poids des tourments et du bonheur abstrait.
Alors il part à la recherche d’un orage,
attrape la fermeture d’un éclair et s’en fait un beau porte-monnaie.
Avec cette fouine remplie d’argent il s’achète, un télectroscope à molécules,
un de ces postes récepteurs d’image et émetteurs d’odeur.
Les premiers mirages qu’il y découvre sont,
les aquapierres lumineuses, qui sont des cailloux surnaturels,
des arbramains qui sont, les bras de la terre,
des montagnadors qui sont, les croûtes de ses blessures,
et les mèrocéans débordantes, sont ses pleurs et sanglots.

Mais, les yeux de lecture des petits as à Saints, dévoreurs de mots,
ont perçu Sam en pleine illusion, dans un état second.
« Ce poste est une drogue capable de faire découvrir de nouvelles choses et surtout, de nouveaux mots ! » ont-ils transmis aux reines.
Les rousses à la peau noire en sont devenues blanches
et ont jeté les petits as à Saints, dans le monde réel,
des choses ennuyantes et trop terraterre.

lundi 10 mars 2008



Touche peau à la minute, le temps d’une
année lumière, le temps d’une
soirée d’hiver. Ache avec Aife sur une dune
se tiennent la main et dans le ciel, il pleut des choses humides
et il pleut sur leurs pieds et dans le sable mouillé
des pensées, qu’ils ont ensemble, en partance de leur main.
De certaines de ces pensées faites les yeux fermés, naissent,
des roches minuscules formant, une vague, une sable de vague
et Ache tient Aife, Aife tient à Ache et achèvent d’une flèche,
leur vie, sur une plénitude de visage, en partance.
Le soleil ressemble, à une poussière de grain, si loin
s’éloignant, il fait froid, mais Ache tient une main,
Aife tient à Ache qui ne la lâche pas, demain est un train
où ils ont mis leurs pieds de sable humide
et il pleut dans leur tête, dans leurs pensées
des sentiments à la pluie tiède, les tiennent
au chaud, serrés, avec leurs mains qui ne se lâchent plus.
Le chemin parcouru, tenu, laisse et traîne derrière eux,
leur traversée de sable à vie, Ache, Aife quittent la charnelle enveloppe
et renforce le lien.
Aussi fort, toujours plus, encore et jusqu’à un infini bout qui n’existe,
deux mains de pensée à vie de sable mouillé se changent
en une comète bleue qui déchire, vide et solitude, qui érafle
les temps perdus, égratigne d’une voie, la lactée mélancolie,
échappe aux dents du néant sablier, perce les cœurs de galaxie
et retombe un jour, d’une vitesse éclair sur un homme et une femme,
en haut d’une dune, au bas d’une fulgurante montagne d’attente.
A cet instant, un homme aura envie de prendre la main d’une femme,
de penser aux choses humides et tièdes du ciel, qui pleut dans leurs rêves
comme une sable de vague, un avenir de visions,
construire une nouvelle civilisation.
Bâtir des lieux d’imagination aux sentiments d’âmes,
créer les proverbes de la raison, les idées de concept de paix,
main dans la main, où les pensées fusionnent comme une vague,
d'un sable de sérénité, des vagues de béatitude ouvrant les mains du futur.
C'est des pensées tièdes, une sable de vague.

- Sable de vague atteignant une planète -

samedi 8 mars 2008


Du regard dégradant, partir loin
dans la boue, basse résille, bousille nos fondations.

Un appel téléphonique venant de ma télécommande télé -
L’opératrice :
« Si vous êtes d’une plate-forme flottante, ne jamais commenter mon corps »
……..(grésillements)
Puis quelqu’un :

_ Il y a longtemps que je désirais vous parler.
_ Ce n’est pas grave, si on s’en fout, c’est une façon de dire qu’on ne vous en veut pas, le comprenez-vous ?
_ On s’ennuie quand on ne se nuit pas.
_ Une parole guère sans paix (c'est vous qui m'ennuyez quand la nuit ne vient pas).
_ ……..(grésillements)
L’opératrice :
« Fin de la comm…… votre correspon………… souhaitez-vous composer un nou……..
(grésillements) »




Puis le vide sur l'horizon... la mèrocéan saoule ses sons sur le rivage et
_ les sous-marins s'échouent, aveuglés de leurs sonars.

Ne rien faire, mais être pris
...au même titre
.


Et puis les danses macabres des agités du bocal qui donnent leurs sous
pour ces fous, qui fabriquent armes et bombes à l’infini
et projettent leurs descendances privilégiées dans d’autres espaces.
Tandis que ces mêmes, qui se demandent pourquoi eux et leurs ancêtres ont voté pendant tant de temps, et ainsi entretenu la machine infernale, s’aperçoivent enfin que leur lente et triste agonie, reste dans une profonde indifférence.
Encore plus aveugles que des non-voyants.

2048, l'espèce animale baptisée "être humain" s'est considérablement développée,
le stade d'homo sapiens est révolu.
L'espace n'a plus de frontière et le pouvoir, a toujours été la seule religion.
Cependant, la biodiversité est plus en route que jamais,
et désormais, les plus faibles auront le droit de respirer, dans des mondes sans limite,
où leurs mutations provoqueront, les nouvelles races d'hommes.


Puisse t-on encore penser librement...




mardi 4 mars 2008


C’est, le cœur palpitant et les larmes aux yeux que Sabin et sa sœur Théoduline tombèrent dans les bras l’un de l’autre. Sur ordre de maître Uobih, Zytoquette, la pendule contoise (que l’on avait oubliée) s’arrêta pour laisser l’instant vivre le moment nécessaire à ces embrassades et tous les petits locataires, cachés derrière les rideaux du rez-de-chaussée comme du premier, contemplèrent la scène avec ravissement.

Après avoir franchi le perron, Sabin Lambronnn fut chaleureusement présenté à toute la famille.
Un homme de taille modeste au teint roux avec de longs favoris, un air brave et humble, des traits agréablement joviaux et une nette ressemblance avec sa sœur, voilà comment tout ce petit monde perçut ce nouvel arrivant. Sabin était habillé d’un pantalon de toile vert foncé s’arrêtant au-dessus des chevilles, laissant apercevoir de larges pieds nus dans des mocassins flambants neufs. Il portait une belle chemise de soie au col volontairement relevé au-dessus de laquelle se trouvait un petit gilet à poches et, n’oublions pas le chapeau en feutre noir qu’il avait poliment ôté avant d’entrer dans les lieux.
Deux grosses valises marrons étaient déposées dans le vestibule. Un liseré rouge en faisait le tour et une grosse étiquette blanche signalait à qui savait lire, les noms et adresses de son propriétaire.
« Sabin Lambronnn, Cymbaline Street, Rochester, Minnesota »

S’étant fabriqué une petite scène de concert au bas de la cheminée, Margoulin et Anounoutte avaient entamé plusieurs airs entraînants dont le très célèbre « Fly fly my pretty friend » ou bien encore
« You’re beautiful when you dream ». Elles furent récompensées par de nombreux applaudissements, burent plus que de raison et semblèrent infatigables. Même quelques hirondelles, attirées par la mélodie, étaient venues se poser sur le rebord des fenêtres. Elles les accompagnaient de leurs chants angéliques et l’une d’elle, qui semblait siffler faux, fut vite la risée de ses congénères, mais elle continua de plus belle et les autres suivirent.

Zytoquette sonna midi. Il était grand temps de passer à table. Nos cuisinières avaient réellement mis les bouchées doubles en proposant un menu des plus alléchants :
Potage de chenilles à barbe, accompagné de croûtons de pain dorés au miel, suivi d’un fricassé de coléoptères mousseux et d’un plat d’algues frit à l’échalote sauvage. Le tout agrémenté de cidre dur, en forme de carré de sucre et pour finir le repas, venait s’ajouter un succulent dessert à base de sève d’arbre fruitier.
Sabin avait tenu à ce que sa sœur lui parle de la région, de sa maison et de tout le reste. Ils se remémorèrent les souvenirs du passé avant que chacun, n’aille faire sa vie de son côté et il promettait à Théoduline, de l’entretenir à propos de « l’affaire » dans l’après-midi, seul à seul.

Le repas fini, le frère et la sœur Lambronnn sortirent de la maison se dégourdirent les jambes. Hans le balai s’apprêtait à faire un petit nettoyage rapide, il le savait, pendant ce séjour, il serait beaucoup plus sollicité qu’à l’accoutumée. Gligline, Sanitata, Loumilette et Flafla avaient commençé leur sieste ainsi que les deux salamandres qui ronflaient déjà depuis une bonne heure, entre deux bûches de bois. Toute la maison était redevenue parfaitement calme et paisible.
Sabin et Théoduline s’engouffrèrent dans la forêt par un chemin de sable blanc et s’assirent, au bout d’une demi-heure de marche, sur un des bancs suspendus d’un vieux platane d’Orient.
Celui-ci relié à une corde jusqu’au tronc, se mit à se soulever à travers le feuillage une fois que les deux promeneurs s’y installèrent.
Et c’est à dix mètres du sol, les pieds dans le vide que Sabin se confia enfin à sa sœur.

_ Chère sœur, j’aimerais en premier lieu te remercier pour cet accueil si chaleureux et ta grande hospitalité qui ont dépassé de loin mes espérances. Je savais que je pouvais compter sur toi, car après tout, nous sommes notre seule famille, même si j’ai vu, combien tu étais heureuse avec tes amis, ce qu’ils représentaient pour toi et pour rien au monde je ne voudrais t’enlever ça, déclara Sabin.
_ Je t’écoute mon frère, ajouta madame Lambronnn.
_ Comme je te l’ai écrit dans ma lettre, ce voyage n’a rien d’ordinaire et il serait bon pour moi comme pour mes affaires de te mettre au parfum sur-le-champ. Crois bien que ce soit tout à ton avantage car autrement, je n’aurais pas fait aussi vite pour venir jusqu’ici.
_ Qui y a t-il Sabin, j’avoue m’inquiéter assez rapidement, parle je suis toute ouïe.
_ Alors tends bien tes oreilles Théoduline, je t’explique. Voilà je suis artisan chaisier depuis maintenant quinze longues années et ma dernière spécialité qui je dois dire, a considérablement contribué à me rendre célèbre, repose sur le fameux fauteuil contrebasse. Celui-ci dispose de particularités sonores et de conforts extrêmement relaxants, de plus, il est confectionné dans un bois rare et précieux dont moi seul, détient le secret de fabrication.
Mais ce n’est pas tout, il y a une quinzaine de jours, je reçois en personne la visite de notre bon roi Cordarico qui souhaite s’acquérir de 127 de ces fauteuils contrebasse pour le mariage de sa fille. Or, et voilà le sujet auquel je craignais un jour devoir parler à quelqu’un, j’apprends de mon docteur que je suis atteint d’une maladie aussi rare que mon bois et qu’il me reste très peu de temps, aussi je venais dans l’espoir et en désirant que tu acceptes, te confier le soin de gérer mon entreprise et ainsi de satisfaire la demande du roi, expliqua Sabin, la main sur celle de sa sœur.

Madame Lambronnn resta abasourdie et regarda son frère sans prononcer la moindre syllabe puis fonda dans ses bras. La décision n’était pas encore prise et il lui fallait plus de temps pour s’en remettre mais surtout, de bons conseils qu’elle trouverait auprès de maître Uobih.
_ Mon frère, mon cher frère, dit-elle enfin.

lundi 3 mars 2008


Tam-tam sur les âmes, la maison ondule ouverte au vent, sans porte ni fenêtre. Ceux qui vivent là auraient pu en perdre la clef, mais ceux qui vivent là sont méticuleux et organisent depuis quelques nuits l’arrivée de Sabin, le frère du personnage principal cité plus bas et qui ayant fait fortune en Amérique en vendant des fauteuils contrebasse par pair de deux, se rend chez sa sœur pour lui annoncer de vive voix, une nouvelle toute singulière.

Entre le poêle à charbon et la petite table de cuisine, et, si l’on regarde un peu mieux, il y a madame Lambronnn avec trois N, petite de jour, haute sur pattes le soir tombé.
Vive, espiègle, maligne et curieuse mais qu’on vous rassure, c’est une petite femme tout à fait charmante quand elle ne fourre pas son nez partout. Son appétit de connaissance est assez considérable pour ne pas dire que c’est un passe temps ou juste un loisir, on peut aisément affirmer qu’il est un hobby vital et d’ailleurs, quand madame Lambronnn est concentrée dans cette activité, elle laisse apercevoir sur son visage une lueur tout à fait intéressante qui entoure ses deux yeux, à la manière d’une paire de lunettes extraordinairement rondes et larges. Et comme madame Lambronnn a quasiment tout le temps le sourire, avec ces marques là, on la prendrait facilement pour un véritable clown, à part je vous l’accorde, quand elle demande une demi-douzaine de fois dans la journée, et avec beaucoup de sérieux à qui la croiserait, combien de N il y a à son nom et malheur à qui se tromperait.

Vient ensuite, maître Uobih. Ce curieux personnage est un des plus fidèles amis de madame Lambronnn. Outre le fait qu’il vive dans le miroir de l’entrée, celui-ci possède un large univers, bien plus vaste que la simple image du hall d’entrée s’y réfléchissant et qu’on ne pourrait deviner si maître Uobih n’y disparaissait pas de temps à autre. Pour sûr maître Uobih est un hibou qui, en plus de donner l’heure, la date et les informations, fait aussi office de boite aux lettres, sonnette d’entrée, réveil, répondeur et la liste est longue.
En effet, je vois que vous avez compris, maître Uobih appelle quand on l’arrive (ou plutôt l’inverse), il est brillant conseiller, excellent confident, en gros, un ami sûr. Maître Uobih est immortel tant que personne… non il vaut mieux pour ce dernier ne rien dire à ce sujet.

Puis viennent, Gligline, Sanitata, Loumilette et Flafla. Pendant qu’elles dorment et restent suspendues au-dessus du fourneau comme les vielles bonnes casseroles qu’elles sont, alors tout va bien mais une fois réveillées, il est vivement déconseillé à quiconque de mettre un pied dans la cuisine. Gligline, Sanitata, Loumilette et Flafla sont non seulement les cuisinières attitrées de la maison mais elles sont aussi de véritables potins ambulants, des commères comme pas deux, les meilleurs concierges, enfin avec elles au moins, tout se sait.

Hans le balai, le vieux suspendu comme on le surnomme, séjourne dans un placard et y en sort une fois par mois à peu près et tout en « balayant », tel est son déplacement, il vous parle de vos ancêtres et communique avec des fantômes invisibles pour le reste de la bande.
Margoulin et Anounoutte, les salamandres de la cheminée sont de vraies aventurières et reviennent chaque automne, pourquoi ? tout le monde l’ignore, elles ne causent pas beaucoup mais sont d’incroyables musiciennes. Et enfin Pixalitone la chienne, est une statue de verre montant la garde devant la maison et qui aboie si quelqu’un se présente, normal, Pixalitone est dotée de capteurs d’aigle canin.

Madame Lambronnn donc, eut réception il y a trois jours d’une lettre de Sabin lui annonçant qu’il souhaiterait rendre visite à sa chère sœur si longtemps absente de sa vie et qu’il avait de plus, chargée dans ses bagages, une nouvelle de poids à lui communiquer au plus vite.
Madame Lambronnn, pensez bien, après avoir répondu à ce courrier favorablement, fut prise d’une grande nervosité traduite sous la forme d’une agitation remarquable, employant tous les résidants de la maison dans des taches de nettoyage et de décoration, Sabin Lambronnn arrivait le lendemain par la malle-poste de dix heures trente.

Ce matin là, Hans le balai fit un dernier tour de maison. Gligline, Sanitata, Loumilette et Flafla étaient occupées à concocter un repas de fête à la hauteur de ces retrouvailles et Margoulin et Anounoutte répétaient des airs de violon quand, Pixalitone se mit à aboyer.

Sabin Lambronnn était là, examinant la maison d’un air profondément radieux et solennel, il ferma quelques secondes ses paupières, gonfla ses poumons et respira longuement tous les parfums et arômes se baladant de ci de là au grés du vent. Il y avait alentour trois magnifiques arbres fleuris de trente mètres de haut et une centaine d’oiseaux dans chacun.
Madame Lambronnn ayant fini de se préparer, descendit l’escalier sur les genoux et alla accueillir son frère comme il se devait.



Ils se vendent par paquet
tiennent dans une main, une poche de briquet
des dragées qu’on mâchonne
des dragées de mots qu’on tâtonne
des mots qu’on mélange à la langue
croquent sous la dent et pétillent au palais
des mots surprises qui s’interrogent
dans quel sens ils feront l’éloge
d’une durée de mastication
ou dans la forme d’une bulle
faire une phrase de chewing-gum
et l’étirer avec les doigts
la coller sur une table
sur un rebord de fenêtre
ou la donner aux pigeons voyageurs.

Les mâcheurs de mots ne se soucient
du sens ou d’une direction suivie
leurs phrases sont des paroles d’acrobates
comme faire des maisons sans une carte
les mâcheurs de mots portent
des lunettes d’eau, des bonnets portés haut
ou bien rien sur le dos
et quand ils ont enfin fini
ils sortent leurs phrases
l’exposent aux yeux du monde
une phrase que personne ne comprend
et que tous trouvent formidablement bien mâchée.

Un grand concours organise
de mâcher des mots pêle-mêle et à l’envers
des lettres sans dessus-dessous
de mâcheurs de mots d’un pays d’un autre
avant l’époque de la traduction.